Ils ne se sont rencontrés qu’une seule fois. Il y a des années de cela. C’était via la fille de la femme avec laquelle son père trompait sa mère. Pas que cela eut une importance en soi, mais en y repensant, c’était le cas, c’est ainsi qu’ils avaient été mis en contact.
L’entrevue fut un choc multiple. Ils venaient de deux pays différents, se croisaient dans un troisième où l’un maitrisait la langue et l’autre à peine, où l’un connaissait la vie, l’autre à peine. Des barrières à l’entrée, il n’y en a que dans les esprits, et ces deux-là avaient surement la tête à l’envers car ils se sont adoptés tels quel.
Pas eu besoin de faire la liste des choses en commun, il n’y en avait pas. Il n’y en a toujours pas. Pourtant, ils se parlent. Il parle. Il parle de cette femme sur laquelle il fait un documentaire.
Parce qu’il est comme il est, il a le droit de passer du temps avec elle sans ses gardes du corps. Parfois ils pleurent ensemble. Avec lui elle se sent en sécurité qu’elle lui a dit. Avec elle, il se sent bénit qu’il explique.
« Tu es une décennie derrière moi et elle est une devant » qu’il observe. Il raconte d’elle qu’elle est un “bel humain” – pas un bel être humain, juste « un bel humain qui passe sa vie à rendre ». Une femme qui se bat pour rapatrier des œuvres d’art volées à leur pays d’origine.
Son mot d’ordre, elle l’a emprunté à un écrivain russe qui a un jour écrit: « là où il y a la paie, il y la culture ». Alors comme si c’était une évidence, parmi toutes, elle a choisi cette bataille là.
Et lui, parmi toutes, il l’a choisi elle. Elle auprès de qui il s’étend, comme un faisceau de lumière.